miércoles, 10 de febrero de 2016

DRUNKEN MESSENGER: LEMBERT

Here's another source meant for the stage. A French play, in which the messenger's name is Lembert. And he's pretty reminiscent of Cassio...

LEMBERT ou LEMBIN, escuyer.
GODEFROY.

The Dowager Queen plots to exchange this letter. In order to do so, she gives the messenger so much wine that he falls asleep. In the romance, this prompts an outburst of indignation from Philippe, who launches into a diatribe against drunkenness, but in the miracle, a comic scene develops as Lembert staggers around drunkenly on stage and makes amorous advances to the Dowager Queen: 

Lembert: 
"Vfezci bon vin. Ça vostre main! 
Je vous jur et créant, ma dame 
De vous feray demain ma femme, 
Par mariage. 
La mère: 
Voire, mais qu'il n'y ait lignage. 
Il est yvre, je te promet. 
Maine le couchier et le met 
En un bon lit.
Lembert, il vous fault par délit 
Venir couchier. 
Lembert: 
Si feray je, mon ami chier, 
Moy et ma dame. 
Godeffroy: 
Voire, aussi est ce vostre femme. 
Alons devant. 
Lembert: 
Alons, mon ami, or avant. 
Venez couchier aussi, ma belle; 
Hurtez bellement, je chancelle. 

[Lembert: 
This is good wine. Here, give me your hand! I swear to you, my lady that tomorrow I will make you my wife in marriage. 
The mother: Certainly, but let there be no offspring. He is drunk, I assure you. Take him and put him in a good bed for the night. 
Godfrey: Lembert, you must for your pleasure come to bed. 
Lembert: I will do so, good friend, and my lady too. 
Godfrey: Certainly, and she is your wife too. Let's go ahead. 
Lembert: Let's go, my friend, come along. You come too, my lovely one; Come carefully, I'm stumbling (1194-1210).] 

To the modern mind, it may seem paradoxical that the tone of the romance should prove to be more moralistic than that of the miracle play. However, as we have noted above, Christian principles play a particularly significant role in La Manekine. Philippe extols Christian virtues and deplores vices throughout the romance in general. Conversely, the miracle play, in common with other forms of religious drama intended for the edification of the public such as saints' lives, morality plays, and mysteries, is not infrequendy also a source of entertainment. The, Jeu de Saint Nicolas and the dramatic adaptation of the parable of the Prodigal Son, Courtois d'Arras, are notable examples, both containing realistic tavern scenes tinged with comedy. "Any opportunity for comic treatment is eagerly seized on by the dramatists," affirms Allardyce Nicoll, remarking that "deliberate deviations from the story are made for the purpose of introducing lower-class characters and of indulging in popular satire." Comic characters and scenes are ample proof that in medieval times there was little division between the religious and secular worlds and modern distinctions between genres are often artificial. Even two genres which are apparendy totally different, such as the morality play and the farce, may contain elements in common, as Alan Knight notes: "The explicit function of the medieval morality plays was to teach, though they often entertained in the process; the function of medieval farces was to amuse, though there was usually a lesson implicit in the joke."





LEMBERT.
Sera-ce bon, je croy que oïl,
Qu'à la mere au roy me transporte
Et que ces nouvelles li porte?
Je tien que j'en amenderay
D'aucun bon dou; et pour ce yray,
Je ne me delaieray point.
Je la voy là : c'est bien à point;
Devant li me vois enclin mettre.
— Ma dame, Dieu le roy celestre
De mal vous gart.
LA MERE.
Lembin, biau sire, quelle part
En alez et dont venez-vous?
Je vous em pri, dites-le-nous,
Et qui vous maine.
LEMBERT.
Chiere dame, soiez certaine
Je m'en vois au roy mon seigneur
Dire-li la joie greigneur
Dont s'ame fust pieça touchiée,
Que d'un filz ma dame acouchée
E[sjt de nouvel.
LA MERE.
Diz-tu voir, Lembin? ce m'est bel,
Foy que je doy sainte Bautheuch!
De la joie qu'en ay, t'esteut
Maishuit avec moy demourer:
Je te vueil donner à souper.
Portes-tu lettres?
LEMBERT.
Oïl, que baillié m'ont les maistres D'ostel, ma dame.
LA MERE.
De ce que tu m'as dit, par m'ame! Ay moult grant joie et le cuer lié.
— Or tost ! s'il est apparcillic, je vueil qu'il souppe, Godelïoy; Et de ce bon vin dont je boy
Ly apportez.
GODEFFROY.
Ma dame, un po vous deportez:
GODEFROY.
Ma dame, patientez un peu c'est comme
Ce v;mll fait. Veez, je mect la table.
Cà ! jp vneu estre entremettable
De li servir.
LA MERE.
S'a mon gré le veulz bien servir, .
Apporte-li cy un bon mès.
Vien avant, s'acoute et li mès
De ce que t'ay baillié en garde,
Si qu'il ne s'en doingne de garde,
Dedans son vin.
GODEFFROY.
Voulentiers, dame, et de cuer tin;
Vez cy de quoy.
LA MERE.
Verse cy pour l'amour de moy.
— Je vueil que vous buvez, Lembin, Et me direz ce est bon vin;
Tout vous fault boire.
LEMBIN.
Chiere dame, par saint Magloire!
Je ne bu si bon vin pieça;
Ce remanant buray or çà,
Puisqu'il vous haitte-
LA MERE.
Vez cy viande bonne et nette,
Dontmengier vous convient, Lembert.
Or monstrez cou serez appert
De bien mengier.
LEMBERT.
Je n'en fera y mie dangier,
Cl/iere dame; et vous, que ferez?
(Cy menjuc.)
— Amis, à boire me donrez,
S'il vous agrée.
LA MERE.
Verse ci bonne haneppée,
Car je le vueil.
GODEFFROY.
Buvez: le hanap jusqu'à l'ueil,
Lembin, est plain.
LEMBERT.
Vez ci bon vin. Çà, vostre main!
Je vous jur et creant, ma dame,
De vous feray demain ma femme
Par mariage.
LA MERE.
Voire, mais qu il n'y ait lignage.
— Il est yvre, je te promet. Maine-le couchier et le met
En un bon lit.
GODEFFROY.
Lembert, il vous fanlt par delit
Venir couchier.
LEMBERT.
Si feray-je, mon ami chier,
Moy et ma dame.
GODEFFROY.
Voire, aussi est-ce vostre femme.
Alons devant.
LEMBERT.
Alons, mon ami, or avant!
— Venez couchier aussi, ma belle; Hurtez bellement, je chancelle.
Qui estes-vous?
GODEFROY.
Ça ! couchiez-vous, mon ami doulx,
En ce lit; je vous couverray.
—Ainsque m'en parte je verray
Sa contenance et son effort.
Par m'ame! c'est bien dormi fort;
Je le vois à ma dame dire.
— Ma dame, Lembin m'a fait rire; Certes, il est à grant meschief. Plus tost n'a pas éu le chief
Sur le lit qu'il s'est endormy.
Diex ! com il sera estourdy
Demain, ce croy!
LA MERE.
Or paiz, et te tais cy tout coy!
Je le vueil aler visiter.
Puisqu'il dort si bien, sanz doubter,
Je verray quelz lettres il porte,
Ains que jamais passe ma porte.
Je les tien; dormir le lairay;
Avec moy les emporteray.
— Or tost, Godeffroy! sanz retraire Vaz me querre mon secretaire
Ysnellement.
GODEFFROY.
Dame, voulentiers vraiement.
— Maisire, Bon, plus ne vous tenez Cy; mais à ma dame venez
Tantost bonne erre.
LE SECRETAIRE.
Alons, puisque m'envoie querre.
— Dame, vous m'avez fait mander: Que vous plaist-il à commander?
Dites-le-moy.
LA MERE.
Vous estes clerc geut et senez;
Hardiement alez esbatre.
Scellée sera sanz debatre
Du scel qui est en ceste lettre,
Et si l'iray en l'estui mettre
Où je pris ceste maintenant.
Mabesongne est trop bien venant.
Tant con Lembert encore dort
Et ronfle en son lit bien et fort,
Me vueil de mon fait delivrer.
C'est fait: voit sa lettre livrer
A qui vouldra.
LEMBERT.
11 est jour, lever me fauldra
Et aler-m'en sanz plus attendre.
A ma dame vois congié prendre:
C'est raison. — Chiere dame, à Dieul
Grans merciz ! j'ay en vostre lieu
Esté tout aise.
LA MERE.
lembert, je vous pri qu'il vous plaise
Parcy venir au retourner;
Quoy que soit vous voulray donner.
Et gardez que ne sache nulz
Que vous soiez par cy venuz;
Je vousem pri.
LEMBERT.
Ma dame, et je le vous ottry;
Jà par moy ne sera séu.
A Dieu. — Tant que j'aie véu
Le roy et qu'à Senliz seray,
De cheminer ne cesseray,
Ains y vueil mettre cure et paine.
Avis m'est qu'en my celle plaine
Le voy là; c'est mon: à ly vois.
Plus l'aprouche, et miex Iecongnois.
—Mon seigneur, Dieu par bonté
Vous doint joie, honneur et santé
Et bonne lin!
LEMBERT.
Sy feray-je sanz contredit.
— Ormefault-il d'errer penser
Ferme et fort, et ne vueil cesser
Tant qu'au chastel de Gort m'appere
Que g'y voie du roy la mere,
Qui m'a fait de donner promesse:
Dont elle m'a mis en leesce.
Je vois savoir que me donrra
Ne quelle bonté me fera,
Ains que plus tarde ne demeure.
Hé ! g'y seray d'assez bonne heure.
Devant moy voy le chastel estre:
Dedans me vois bouter et mettre;
G'y seray bien venuz, ce tien.
— Ma dame, Diex y soit ! je vien:
Aray-je boire?
LA MERE.
Oïl, Lembin, par saint Magloire!
Que fait le roy?
LEMBERT.
Bien, ma dame, foy que vous doy!
Au moins pour lors que le laissay;
Mais de son estat riens ne say
Ne comment la feste se passe,
Car je n'oy d'estre à court espassc
Que tant comme ma lettre fist
Et qu'il la me bailla et dist
Que songneux fusse et diligens
De la rapporter à ses gens
De par de ça.
LA MERE.
Ne peut chaloir. — Çà, le vin, çà,
Et des espices!
GODEFROY.
Madame, je seroie nices
Se je disuie: t Non feray. »
En l'eure vous en portera y;
Querre le vois.
LEMBERT.
Que peut ce estre? je n'oy des moys
Si grant sommeil comme il m'est pris
Puis que j'entray en ce pourpris,
Et si ne scé dont ce me vient.
— Ma dame, dormir me convient
Avant toute heuvre.
LA MERE.
I1 ne fault mie qu i requeuvre.
Une foiz avant buverez
Et des espices mangerez,
Foy que doy m'ame!
GODEFFROY. ,
Prenez les espices, ma dame,
Devant le vin.
LA MERE.
Sa ! j'ay pris : or porte à Leinbin,
S'en prenilera.
LEMBERT.
Je ne sçay se bien me fera,
Tantay sommeil!
LA MERE.
Mais que nous arons beu, je vueil,
Godeffroy, que couchier le maines,
Et que de li couvrir te paines,
Et qu'il dorme aise.
(Yci boivent sanz riens dire.)
LEMBERT.
Chiere dame, ne vous desplaise,
Se ci ne sui plus longuement,
Je m'en vois dormir; vraiement,
Je n'en puis plus.
LA MERE.
Or alez, Lembert: que Jhesus
Vous doint, amis, bon somme prendre!
— Alez avec li sanz attendre
Tdst, Godeffroy.
GODEFFROV.
Youlentiers, ma dame, par foy! — Lembert, alons.
LEMBERT.
Je vous pri que des piez balons
Pour y aler.
GODEFFROY.
Or reposez sanz plus parler;
Puisque couchié estes, Lembert,
Va que Vous estes bien couvert, Yci vous luis.
LA MÈRE.
Tu n'as pas fait trop grani relais Avec Lembert.

LA MERE.
Bien est; or entens mon propos:
J'aray encore un po à faire
De maistre Bon, mon secretaire;
Va le querir.
GODEFFROY.
Je vois sanz moy plus ci tenir,
Ma dame chiere.
LA MERE.
Et je vois savoir quelle chiere
Fait Lembert tout secréement.
Bien va; puisqu'il dort vraiement,
Sa boiste et ses lettres prenray,
Et ce que devisent saray
Bien tost, ce puis.
GODEFFROY.
Maistre Bon, bien à point vous truis.
Encore à ma dame venir
Vous fault sanz vous plus ci tenir,
Puisque vous mande.
LA MERE.
Or ne m'y fault-il que une chose:
C'est le seel; bien l'i metteray
Et cy dedans le bouteray.
Voue (sic) ! et sanz moy plus deporter,
Vois tost à Lembert reporter.
La Manequine male joye
Ara, se fas ce que queroie.
Fait ay par temps.
LEMBERT.
Se autrement à errer n'entens,
Je pourray villenie avoir;
Il m'en fault faire mon devoir.
I et l'enfant, car nous désirons les voir à notre retour. »
— Ma dame, prendre vien congié;
De ce que j'ay beu et mengié
Je vous mercy.
LA MERE.
Lembert, puisque tu pars de cy,
Ne sçay quoy t'avoie promis;
Vez cy cent florins, tien, amis,
Ayde-t'en.
LEMBERT.
Grans merciz, ma dame ! en bon an Vous mette Diex!
LA MERE.
Va-t'en, va ; je te feray miex
Une autre foiz.
LE PREVOST.
Lembert, amis, et il t'ait mis
Huy en bonjour!
LE ROY D'ESCOSSE.
Lembert, dy-me voir sanz retraire,
Ou tu mourras, certes, à rage.
Quant à moy venis en message,
Où fu ta voie?
LEMBERT.
Mon chier seigneur, se Dieu me voie,
Du droit chemin ne destournay
Onques, fors tant que je tournay
A vostre mere pour li dire
Que ma dame avoit un filz, sire:
De quoy ma venue ot tant chiere
Qu'elle me fist moult bonne chiere;
Celle nuit jus en son hostel.
Au retour de vous autretel,
Monseigneur, fis.






LEMBERT.
Sera-ce bon, je crois que oui, que je me transporte chez la mère du roi et que je lui porte ces nouvelles? Je tiens que j'y gagnerai quelque bon cadeau : c'est pourquoi je veux y aller sans retard. Je la vois là-bas: c'est bien à point; je vais lui faire la révérence. — Ma dame, que Dieu, le roi des cieux, vous garde de mal!
LA MÈRE.
Lembin, beau sire, en quel endroit allez-vous et d'où venez-vous? Je vous prie de nous le dire, aussi bien que ce qui vous mène.
LEMBERT. .
Chère dame, soyez-en certaine , je m'en vais auprès du roi mon seigneur lui annoncer la plus grande joie dont son ame ait été depuis long-temps affectée, car ma dame est nouvellement accouchée d'un fils.
LA MÈRE.
Dis-tu vrai, Lembin ? J'en suis charmée, par la foi que je dois à sainte Bathilde! Pour la joie que j'en ai, il te faut au- , jourd'hui demeurer avec moi : je veux te donner à souper. Portes-tu des lettres?
LEMBERT.
Oui, madame; ce sont les maîtres d'hôtel qui me les ont données.
LA MÈRE.
Sur mon ame! j'ai uue très-grande joie et le cœur enchanté de ce que tu m'as dit. — Allons! si le souper est prêt, Godefroy, je veux qu'il soupe; et apportez-lui de ce bon vin dont je bois.
I si c'était fait. Voyez, je mets la table. Allons! je veux m'occuper à le servir.
LA MÈRE.
Si tu veux le bien servir à mon gré, apporte-lui ici un bon mets. Approche, écoute, et mets-lui dans son vin de ce que je t'ai donné à garder, de manière à ce qu'il ne s'en aperçoive pas.
GODEFROY.
Volontiers, dame, et de tout mon cœur; voici de quoi.
LA MÈRE.
Verse ici pour l'amour de moi. — Lembin, je veux que vous buviez, et vous me direz si ce vin est bon; il vous faut tout boire.
LEMBIN.
Chère dame , par saint Magloire! il y a long-temps que je ne bus d'aussi bon vin; je vais boire ce reste, puisque cela vous fait plaisir.
LA MÈRE.
Voici de la viande qui est bonne et appétissante; il vous faut en manger, Lembert. Allons! montrez-nous que vous vous acquitterez bien de cet office.
LEMBERT.
Je ne ferai pas de difficultés, chère dame; et vous, que ferez-vous! (Ici il mange.) — Ami, vous me donnerez à boire , si vous le voulez bien.
LA MÈRE.
Verse ici un plein hanap, car telle est ma volonté.
GODEFROY.
Buvez : le hanap, Lembin, est plein jusqu'à l'œil.
LEMBERT.
Voici de bon vin. Allons, votre main ! Je vous jure et vous assure, ma dame, que demain je ferai de vous ma femme par le mariage.
LA MÈRE.
Oui vraiment, pourvu que nous n'ayons pas d'enfans. —- Il est ivre, je te le promets. Mène-le coucher et mets-le dans un bon lit.
GODEFROY.
Lembert, il vous faut par plaisir vous venir coucher.
LEMBERT.
pui, mon cher ami, ma dame et moi,
GODEFROT.
Oui, en vérité; aussi bien est-ce votre femme. Allons devant.
LEMBERT.
Allons, mon ami, en avant ! — Ma belle, venez aussi vous coucher; heurtez doucement, je chancelle. Qui étes-vous?
GODEFROY.
A llons I mon doux ami, couchez-vous dans ce lit, je vous couvrirai. — Avant de m'ea aller, je verrai sa contenance et ses grimaces. Par mon ame! il dort fort bien ; je vais le dire à ma dame. — Ma dame, Lembin m'a fait rire; certes, il est bien pris. Il n'a pas eu plus tôt la tête sur le lit qu'il s'est endormi, Dieu! comme demain, à ce que je crois, il sera étourdi!
LA MÈRE.
Allons, paix, et tiens-toi coi! Je veux aller le visiter. Puisqu'il dort si bien, sans hésiter, je verrai de quelles lettres il est porteur, avant qu'il passe jamais ma porte. Je les tiens; je le laisserai dormir, après les avoir emportées. — Allons, Godefroy, sans répliquer, va me chercher mon secrétaire tout de suite.
Godefroy'.
Dame, volontiers, en vérité. — Maître. Bon, ne vous tenez plus ici; mais venez bien vite vers ma dame.
LE SECRÉTAIRE.
Allons-y, puisqu'elle m'envoie chercher. — Dame, vous m'avez fait mander: que vous plait-il de m'ordonuer? dites-le-moi.
LA MÈRB.
Vous êtes clerc gentil et sensé ; allez sans crainte vous ébattre. Elle sera scellée sans difficulté avec le sceau qui est en cette lettre, et j'irai la meure en l'étui où je pris celle-ci tout à l'heure. Mon affaire va bien. Pendant que Lembert dort encore et ronfle bien et fort dans son lit, je veux en fiuir. C'est fait. Qu'il aille livrer sa lettre à qui il voudra.
LEMBERT.
Il est jour, il faudra me lever et m'en aller sans plus attendre. Je vais prendre congé de madame .-c'est juste. Chère dame, adieu! grand merci l j'ai été très-bien traité chei vous.
LA MÈRE.
Lembert, veuillez, je vous prie, venir ici à votre retour; je veux vous donner quoi que ce soit. Et prenez garde que personne ne sache que vous êtes venu ici, je vous en prie.
LEMBERT.
Ma dame, je le veux bien; personne rie le saura par moi. Adieu. —Jusqu'à ce que je sois à Senlis et que j'aie vu le roi, je ne cesserai de marcher; au contraire, je veux m'y appliquer soigneusement. Je crois que je le vois là-bas au milieu de cette plaine; oui. vraiment: je vais à lui. Plus j'approche de lui, mieux je le reconnais. — Monseigneur, que Dieu par sa bonté vous donne joie, honneur, santé et bonne fin!
LEMBERT.
Que je n'aie jamais mal aux dents! mon cher seigneur, je le leur dirai bien. Je ne resterai plus ici; je m'en vais, sire.
Le Roi D'écosse. Allons, va! et sache bien leur répéter ce que je t'ai dit.
LEMBERT.
C'est ce que je ferai, sans y manquer.— Maintenant il me faut penser à marcher fort et ferme, et je ne veux m'arréterque lorsque je serai arrivé au château de Gort et que j'y verrai la mère du roi, qui m'a promis un présent: ce qui m'a rendu joyeux. Avant qu'il soit plus tard, je vais savoir ce qu'elle me donnera et à quel point elle sera libérale à mon égard. Eh ! j'y serai d'assez bonne heure. Je vois le château devant moi: je vais m'y glisser; je tiens pour certain que j'y serai bien reçu. — Ma dame, que Dieu soit céans ! me voici: aurai-je à boire?
LA MÈRE.
Oui, Lembin, par saint Magloire! Comment se porte le roi?
LEMBERT.
Bien, ma dame , par la foi que je vous dois! au moins il en était ainsi quand je le laissai; mais je ne sais rien de sa position au tournoi, ni comment la féte se passe: car je n'eus pour rester à la cour que le temps qu'il prit à faire ma lettre, à me la donner et à me dire que je fusse soigneux et diligent à la reporter à ses hommes de l'autre côté du détroit;*;
LA MÈRE.
Cela ne fait rien. — Holà, le vin, bolà, et des épices!
GODEFROY.
Ma dame, je serais un imbécile si je refusais de vous obéir. Je vous en apporterai sur l'heure ; je vais les chercher.
LEMBERT.
Qu'est-ce que cela peut être? voici plusieurs mois que je n'ai pas eu une envie de dormir aussi violente que celle qui m'a pris depuis que je suis entré dans cet appartement , et je ne sais d'où cela me vient. — Madame, avant tout il me faut dormir.
LA MÈRE.
Je ne veux pas m'y opposer. Auparavant vous boirez un coup et vous mangerez des épices, par la foi que je dois à mon ame I
GODEFROY.
Ma dame , prenez les épices avant le vin.
LA MÈRE.
Allons!j'en ai pris: maintenant présente à Lembin, il en prendra.
LEMBERT
Je ne sais pas si cela me fera du bien , tant j'ai sommeil!
La MÈre.
Dès que nous aurons bu, je veux, Godefroy, que tu le mènes coucher, et que tu aies soin de le couvrir, de manière à ce qu'il dorme à son aise.
(Ici ils boivent sans rien dire.)
LEMBERT. *
Chère dame, ne vous déplaise, si je n'ai pas à rester plus long-temps ici, je m'en vais dormir; en vérité, je n'en puis plus.
LA MÈRE.
Eh bien! allez, Lembert; que Jésus vous donne un bon somme, mon ami ! — Godefroy, allez vite sans retard avec lui.
GODEFROY.
Volontiers, ma dame, par (ma) foi! — Allons, Lembert.
LEMBERT.
Travaillons des pieds, je vous prie, pour y aller.
GODEFROY.
Allons! reposez-vous sans parler davantage; Lembert, puisque vous êtes couché et bien couvert, je vous laisse ici.
LA MÈRE.
Tu n'as pas fait une trop longue pause avec Lembert.
GODEFROY.
Ma dame, je l'ai couché et couvert: n'est-ce pas assez? Il est si las qu'il n'a besoin que de repos.
LA MÈRE.
C'est bien; maintenant écoute-moi: j'ai encore quelque chose à faire avec mon secrétaire, maître Bon; va le chercher.
GODEFROY.
Ma chère dame, j'y vais sans me tenir plus long-temps ici.
LA MÈRE.
Et moi je vais savoir secrètement quelle figure fait Lembert. Tout va bien ; puisqu'il dort tout de bon, je vais prendre sa boite et ses lettres, et je saurai bientôt, si je puis, ce qu'elles portent.
GODEFROY.
Maître Bon, je vous trouve bien à propos. Il vous faut encore venir sans tarder auprès de ma dame, elle vous mande.
LE SECRÉTAIRE.
Je vais y aller de bon cœur, Godefroy, car j'y suis tenu. — Chère dame, je suis venu à votre commandement.
LA MÈRE.
Maître Bon, je voudrais savoir ce que cette lettre porte. Lisez-la-moi, que je puisse en entendre la teneur.
LA MÈRE.
Maintenant il n'y manque plus qu'une chose: c'est le sceau; je l'y mettrai bien et je le placerai ici dedans. Voilà ! et sans m'a* muser davantage, je vais vite reporter (cela) à Lembert. La Manequine aura une joie de mauvais aloi, si je réussis. J'ai fini à temps.
LEMBERT.
Si je ne m'applique à voyager autrement , je pourrai avoir des reproches; il me faut remplir mon devoir en ce point.
LA MÈRE.
Lembert, puisque tu pars de céans, je t'avais promis quelque chose : voici cent florins; tiens, mon ami, fais-en usage.
LEMBERT.
Grand merci, ma dame 1 que Dieu vous mette en bonne année!
LA MÈRE.
Va-t'en, va; je te donnerai plus une antre fois.
LEMBERT.
Adieu, ma dame, je m'en vais. Rien ne m'arrêtera jusqu'à ce que je vienne à Berwick. Je vois la ville, tant j'en suis près; je veux me hâter d'y entrer. — Messeigneurs, que Dieu qui de Marie voulut faire sa mère et son amie, soit votre ami!
LE PRÉVÔT.
Lembert, mon ami, qu'il te mette aujourd'hui en un bonjour!

LE ROI D'ECOSSE.
Lembert, dis-moi l'entière vérité, ou, certes , tu mourras dans les tourmens. Quand tu vins en message auprès de moi, par où passas-tu?
LEMBERT.
Mon cher seigneur, Dieu me garde ! je ne me détournai pas du tout du droit chemin, sinon que j'allai, sire, vers votre mère pour lui dire que ma dame avait un fils : ce qui lui rendit ma venue si agréable qu'elle me fit très-grande fête; cette nuit-là je couchai dans son logis. En revenant d'auprès de vous, monseigneur, je fis de même.

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