"Cassio, for example, owes strict loyalty (honest love and duty) to his superior Othello who has entrusted him with the watch on a fortress island only half civilized. The aristocratic officer who already knows that his weakness is strong drink but who wants to be popular with the common soldiers succumbs to Iago’s blandishment that he will be more accepted by “the boys” if he drinks with them. Then, when intoxicated, Cassio becomes increasingly super-sensitive, testy and out of control. Then, anguished by the loss of his position and reputation instead of patiently awaiting his return to Othello’s trust and favor, he begs, cajoles and pressures Desdemona herself to pressure Othello quickly to restore him to his rank. He contributes to the tragedy, to the madness of Othello and the murder of Desdemona just because self service rises above the ideal of the devoted service."
"En fait, c'est un peu comme la scène entre Iago et Cassio. Iago tend un piège à Cassio : il lui propose de boire. Cassio sait qu'il ferait mieux de s'abstenir, mais il se laisse tenter. Et une fois le poison absorbé, Iago et le spectateur savent que ce n'est plus qu'une question de temps... Alors, est-ce que Cassio était libre de refuser ? Quand il entre en scène, Shakespeare, qui laisse très peu de choses au hasard dans ce genre de pièces, lui fait dire qu'il a déjà bu un verre. Donc, il est déjà sous l'emprise quand Iago entreprend de l'enivrer... Comme si tout avait déjà commencé, ou comme si tout commencement visible devait être précédé d'un autre commencement invisible... Alors, est-ce que Cassio est libre, est-ce qu'il est aliéné ? Comment passe-t-on du pôle de la vertu à ses antipodes, le pôle du vice ? Ou encore, comme se le demande Cassio après coup, quel plaisir obscur peut-on prendre à devenir une bête ? L'alcool est sa "faiblesse", comme Shakespeare le lui fait dire; celle d'Othello est certainement plus difficile à nommer, mais elle est bien là. Simplement, cette "faiblesse" n'est pas à elle toute seule une contrainte suffisante, qui aurait pour effet de nous jeter hors de nous-mêmes, dans l'aliénation. Elle est plutôt, cette faiblesse, ce par quoi l'aliénation s'ouvre un chemin. Cela commence comme une petite fêlure, juste un petit verre ou un petit soupçon, trois fois rien, trois mots jetés au passage, et chemin faisant, le long de cette pente, on va jusqu'à l'ivresse ou jusqu'à l'obsession, puis jusqu'au meurtre. Personne ne peut prédire que ça ira toujours jusque-là. Mais une fois que c'est allé jusqu'au bout, rétrospectivement, on s'aperçoit que c'est pourtant bien par là que c'est passé, par ce chemin. Et il y a bien quelque part un moment où ça doit avoir basculé, où on ne peut plus se dégager : la drogue a fait son effet, les mots ne se laissent plus oublier, on est passé de l'altération à l'aliénation... On est possédé. Il y a fatalité, mais c'est une fatalité qui est faite de "je-ne-sais-quoi" et de "presque-rien"... Quand il s'agit de décrire ou de rendre sensibles ces transitions fines, Shakespeare est un maître.
Iago, jusqu’ici, est calme, neutre, effacé. D’une banalité inscrutable. Soudain il chante, l’air de rien, une chanson à boire. On pressent qu’une machine infernale vient de se déclencher, un crescendo dont Iago va contrôler à sa guise les étapes. Depuis que Cassio a absorbé son verre d’alcool, le compte à rebours a commencé : le toxique est en lui, il suffit maintenant d’attendre qu’il lui monte à la tête. L’empoisonnement – figure de l’inéluctable. Le Maure, lui aussi, sera empoisonné, mais d’abord par des mots.
Iago, jusqu’ici, est calme, neutre, effacé. D’une banalité inscrutable. Soudain il chante, l’air de rien, une chanson à boire. On pressent qu’une machine infernale vient de se déclencher, un crescendo dont Iago va contrôler à sa guise les étapes. Depuis que Cassio a absorbé son verre d’alcool, le compte à rebours a commencé : le toxique est en lui, il suffit maintenant d’attendre qu’il lui monte à la tête. L’empoisonnement – figure de l’inéluctable. Le Maure, lui aussi, sera empoisonné, mais d’abord par des mots.
Iago se tient entre les deux hommes, eux-mêmes de part et d’autre de la table. Le vin coule, l’échanson infernal monte sur la table pour chanter encore.
Tiens, Iago est moins discret ! Il a ses raisons, évidemment.
Il chante à pleins poumons, vulgaire à souhait : magnifique provocateur, accélérateur de bourrasque, paratonnerre narguant l’ivresse de Cassio, teintée de honte, de colère, d’impuissance et de mépris de caste. La symétrie du plateau, resserrée autour de la table, est maintenant comme un ressort qui s’est comprimé…
Cassio quitte la place, dans un suprême effort pour s’arracher à l’influence démoniaque de l’enseigne. Mais les jeux sont faits. Sur scène, le calme apparent est de ceux qui précèdent les tempêtes. Même absent, le lieutenant ivre pèse de tout son poids sur le plateau, tirant l’oeil du spectateur du côté cour. D’autant plus que Iago a envoyé Rodrigo, son comparse et sa dupe, rejoindre Cassio dans la coulisse… Soudain des cris, une course de cour à jardin – et la bagarre fatale éclate. Le ressort du piège s’est détendu : cette fois-ci, l’équilibre est bien rompu. Dans quelques secondes le scandale sera complet, Othello sera contraint de renvoyer son lieutenant. L’état initial était symétrique ; une fois l’état final atteint, la symétrie ne reviendra plus – la chute de Cassio est accomplie, l’objectif de Iago est atteint."
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